Gastronomie bulgare

En Bulgarie, on a mangé pas mal de bonnes choses. Rien de très chic ou très exotique, mais de bons produits, bien cuisinés (et des plats souvent énormes). Il n’y a pas de menus, pas vraiment non plus de différence entre les entrées et les plats. Les cartes sont généralement énormes, souvent classées par type d’ingrédients ou mode de cuisson. Résultat, quand vous commandez quelque chose, difficile de connaître d’avance la taille du plat. Par exemple, un gratin de courgettes au chèvre commandé un midi s’est avéré être trois petits morceaux de fromage entourés d’une lamelle de courgette.

Parfois, on vous apporte directement des assiettes pour toute la tablée avec un plat. C’est courant de partager ses plats.

Halloumi

Il y a deux sortes de fromage : le Sirene/white cheese, un genre de feta, et le le Kashkaval/yellow cheese (oui la traduction anglaise est très littérale), je crois plutôt à base de lait de brebis ou de chèvre (mais ça n’a pas l’air très déterminé). Ils se mangent chaud, froid, seul ou dans des plats. Il y a par exemple le délicieux Halloumi qui consiste en une petite tranche de Sirene grillée (parfois au feu de bois !).

 

Boza

 
 

M. a bu au moins l’équivalent d’une vache en Ayran (un genre de yaourt liquide) et moi l’équivalent d’un citronnier en citronada (eau gazeuse + citron + sucre (ou non)). Au bout de trois jours, j’ai découvert qu’il y avait mieux : la lemonade (citron + eau plate ou gazeuse + menthe mixée + sucre (ou pas)).
Pour se conformer à la tradition, on a aussi tenté de boire un truc local : le Boza, une boisson d’un couleur douteuse à base de céréales fermenté. M. est pourtant très aventurier en matière de boissons, mais aucun de nous n’a réussi à en boire plus de deux gorgées (bien sûr, confiants, on en avait commandé un litre).

Et puis sinon, on a mangé :

 

Du mishmash impossible à dessiner (oeufs brouillés, tomates, poivrons, fromage, persil)

 
 
 

 
 

Des kebapche / kufteta (je ne sais pas quelle est la différence). Enfin donc ce sont de très bonnes boulettes de viande, parfois avec du fromage dedans.

 
 
 
 
 
 

 
 
 

Des gâteaux au chocolat, aux noix, avec au moins cinq étages (et des petits biscuits avec des cacahuètes, de la meringue, du chocolat, de la noix de coco).

 
 
 

 
 
 

De la shopska salata (tomates, concombres, olives, poivrons, oignons, le tout parsemé de fromage râpé ou en cubes) avec des légumes qui ont dix fois plus de goût que même les légumes bios de l’amap.

 
 
 
 
 

 
 
 
 

Des noix de cajou, des pistaches (déjà décortiquées), des cacahuètes et d’autres noix. Il y a des magasins de noix. Il y en avait même dans les frigos des chambres d’hôtel.

 
 
 
 
 
Et puis toutes sortes de légumes grillés et de beignets de légumes, des feuilles de vignes, des caviars de tomates, aubergines, poivrons pleins d’épices, des boules d’ayran glacé, des viandes à la sauce au fromage, du pain pita dégoulinant de fromage, de la polenta au fromage, et donc plein de choses au fromage.
legumes
 

Ecrire dans son carnet pour rester en vie

Je cherche depuis des années le carnet idéal. Le bon format, l’épaisseur idéale, la texture et la couleur de feuilles parfaites, la bonne rigidité, le lignage indispensable à mon incapacité à écrire droit. J’en ai essayé des dizaines, tant pour la prise de notes que le dessin, sans parvenir à trouver le carnet parfait. Et chaque fois qu’il me semblait l’avoir entre les mains, je changeais d’avis quelques semaines plus tard.

Bien sûr, c’est tout à fait absurde parce qu’au fond, mes notes ne seront ni plus nombreuses, ni plus créatives dans un meilleur carnet, et mes dessins ne seront pas plus réussis sur un papier plus adapté à mes feutres. C’est davantage un fétichisme qu’une recherche objective qui s’exprime, je crois. On part à la recherche du carnet parfait comme on tente d’écrire le livre parfait : en sachant qu’on n’y parviendra jamais. Mais c’est justement ce qui importe. Si je n’entamais pas chaque nouveau carnet avec l’enthousiasme d’un nouvel amour, si je ne les conservais pas comme la trace unique et indéfectible du passé, je ne serais pas heureuse de prendre des notes. Je n’écrirais pas dans mon carnet. Et tant que j’écris dans mon carnet, je suis en vie.

Sofia

Cette semaine, j’accompagne M. à Sofia, en Bulgarie. Pendant qu’il fait des rencontres et des ateliers dans des écoles, je me promène dans la ville et travaille dans les cafés. C’est une ville idéale pour délocaliser son bureau, il y a de grands cafés lumineux (à l’américaine), du wifi gratuit partout (même dans les stations-service), et de la citronnade.

C’est un drôle de pays, un mélange d’influences grecques, turques et bien sûr soviétiques (beaucoup). Les habitants galèrent pas mal, les bâtiments sont peu entretenus, mais on y mange très bien (et très copieusement), et la ville est douce, pleine de parcs et entourée de montagne. Cet après-midi, visite du musée d’art soviétique. Passages rapides hier à Stara Zagora, et avant-hier à Plovdiv, deux villes au riche patrimoine historique.

J’ai acheté un guide de conversation bulgare et je renoue avec l’alphabet cyrillique. Pouvoir le lire, même sans rien comprendre, c’est comme savoir déchiffrer des hiéroglyphes. On se sent hyper fier.

Tous à poil

Je n’ai pas encore parlé de la polémique qui anime le monde de la littérature jeunesse en ce moment. Enfin plus exactement, et c’est ce qui est intéressant là-dedans, la polémique qui n’a véritablement lieu qu’en dehors du monde de la littérature jeunesse. A l’intérieur, tout le monde est à peu près d’accord.
J’ai lu pas mal de choses sur la question ces dernières semaines, des réponses d’auteurs et d’éditeurs bien formulées et intéressantes, parfois drôles (ici, ici, , ou encore ou ), mais je dois reconnaître que je reste hébétée par le fait même qu’il y ait polémique. Ça me semble fou que des gens s’indignent de l’indécence de la littérature jeunesse quand je la trouve au contraire souvent frileuse et coincée dans ses acquis. Mais j’oublie que ce qui est évident pour moi ne l’est pas forcément pour les autres.
Cette frilosité n’est bien sûr pas le cas de tous : de nombreux auteurs et éditeurs publient des livres aux textes originaux, audacieux, intelligents et impertinents. Mais j’ai aussi pas mal d’exemples d’auteurs qui peinent à faire publier leurs textes dès qu’ils sortent un peu des sujets et des formats traditionnels. (Je ne parle pas des illustrations car il me semble que les maisons d’éditions ont globalement moins peur de prendre des risques de ce côté là. Souvent même, l’innovation graphique est un peu l’excuse pour ne pas se préoccuper du texte.)
Sans doute suis-je un peu déçue à cause mes récentes déconvenues personnelles, mais c’est désespérant de voir toute l’indignation que peuvent provoquer des livres jeunesse quand il y a déjà tellement de précautions prises.

L’excellent site arrêt sur images consacre son émission hebdomadaire au sujet. L’émission est plus courte que d’habitude et aucun auteur n’est invité sur le plateau, mais bon, c’est déjà ça.

Travailler dans les cafés

Depuis septembre dernier, M. et moi avons adopté un nouveau rythme de travail. Avant, nous allions presque quotidiennement à l’atelier, où nous avions chacun un bureau. La décision de ne partager plus qu’un seul bureau s’est accompagnée pour moi de petits changements professionnels, afin de consacrer plus de temps à l’écriture.

Depuis, j’aime passer d’un lieu à un autre. Chacun possède sa vie propre et son rythme bien particulier. J’y écris différemment, pas forcément sur les mêmes travaux. Chaque arrivée dans un espace est un retour à zéro.
L’atelier est devenu presque une extension de la maison. C’est un espace sur deux étages que l’on partage à huit/dix personnes, une grande cabane calme et studieuse perchée sous le toit d’un petit immeuble de l’hypercentre.
A la maison, le bureau est entouré de bibliothèques et d’instruments de musique, le chat dort sur le canapé à côté, je peux mettre la musique en haut-parleur, chantonner, faire quelques pas de claquettes, picorer des phrases dans un livre puis me remettre au travail.
Et puis il y a les cafés. C’est sans doute là que je travaille le mieux. Étrangement, les discussions autour de moi, le brouhaha, ne me gênent pas vraiment. Au contraire, c’est dans ces lieux moins familiers que je parviens à me concentrer le mieux.
C’est une équation compliquée de trouver un lieu où l’on se sente bien. Il faut un endroit espacé, calme mais pas désert, où l’on peut trouver un certaine intimité, du wifi gratuit, des consommations pas chères et/ou très bonnes, et des serveurs sympas qui ne vous font pas sentir que vous squattez un peu trop longtemps.
A fil du temps, j’ai trouvé plusieurs points de chute à Nantes. Hasard ou pas, mes trois préférés sont dans la même rue.

  • Le Cercle Rouge (rue des Carmes), lieu de travail et de rendez-vous bien connu des indépendants, pas cher, plutôt studieux le matin et plus familial l’après-midi,
  • La librairie-café les Bien-Aimés (rue de la Paix), étroite mais cosy et tout en bois, le rez-de-chaussée permet d’être dans la vie de la librairie, glissé entre deux étagères de livres, le premier étage fait plus salon. Il y a de chouettes boissons (comme le citron chaud de Corée) et des gourmandises pas chères (mention spéciale pour le fondant au chocolat et le rocher coco, les tartes servies le midi sont également très bonnes),
  • Le premier étage de Monsieur Machin (rue Saint Léonard) très calme et souvent vide jusqu’à 17h (et le chocolat chaud est bon),
  • Le Tabl’O Gourmand (cours des 50 étages), avec plein de bonnes choses à manger, de l’espace, et une ambiance un peu scandinave,
  • Le Shefferville Café (rue du Maréchal Joffre), avec du café à volonté et de très bons bagels, mais j’avoue n’y avoir jamais travaillé (l’espace est assez étroit).

Bien sûr, il y a aussi les bibliothèques et le Mc Donald, mais ce n’est pas aussi douillet que les cafés.
Si vous connaissez d’autres lieux de ce genre à Nantes, je suis preneuse !

Des filles, surtout

C’est une période de lectures enthousiasmantes et ça fait du bien. J’ai lu La petite communiste qui ne sourit jamais, de Lola Lafon, très beau texte sur le corps qu’on regarde, qu’on dompte, qu’on pousse à bout, qui se transforme, et qui nous échappe. Et puis le riche et passionnant Beauté Fatale de Mona Chollet et le très émouvant La tendresse des pierres de Marion Fayolle, qui parlent aussi, chacun à leur manière, du corps qui nous enferme et de celui qui meurt.

Et puis Richard Brautigan (enfin lu, avec une certaine évidence), Thomas Vinau, toujours si délicat, et Joan Didion, consœur migraineuse dont je découvre les livres !

Des inondations et des cartes à Venise

Notre séjour à Venise m’a permis de réaliser l’un de mes rêves. A savoir : vivre une inondation, mais sans que ce soit une catastrophe. Enfant, j’étais très frustrée de me dire que puisque je vivais en montagne, les probabilités de faire du bateau dans la rue étaient particulièrement faibles. Je n’ai certes pas pagayé dans les rues de Venise, mais l’acqua alta m’a permis de patauger dans une vingtaine de centimètre d’eau place Saint-marc et c’est déjà une petite victoire sur mon rêve. (Au passage : étions-nous les seuls au monde à n’avoir jamais entendu parler de ce phénomène ?)

Venise

Venise a aussi contenté une autre de mes passions étranges, puisque j’ai pu ramener une copie de cette géniale carte de Venise gravée par Jacopo de’ Barbari et visible, entre autres, au Palais des Doges.

20140206-211708.jpg

 

De belles lectures

Des livres du moment : Franny and Zooey de F.S. Fitzgerald, Le bonheur par le shopping de Héléna Villovitch, Le bébé philosophe d’Alison Gopnik, Sur le chemin des glaces de Werner Herzog, et le Journal d’Anaïs Nin.
Je me plonge et replonge dans des Roald Dahl aussi, Escadrille 80, que je n’ai jamais lu.

De belles découvertes en livres jeunesse aussi : F comme Ferdinand de Héléna Villovitch, Le bureau des papas perdus de Eric Veillé, Les aventures d’Itamar de David Grossman (illustré par Charlotte des Ligneris, éminente membre de l’Atelier Autonome), Histoire de la maison qui voulait déménager, de Hervé Walbecq. C’est enthousiasmant de lire tant de livres jeunesse vivants, drôles, intelligents, originaux. La créativité se porte bien à l’ombre, et c’est réjouissant.

J’ai quasiment achevé les dernières corrections de mon prochain roman jeunesse, j’en parle bientôt. En attendant, cure de tisanes bio (bourgeons de pin !), de thés, de smoothies maison (cocktail du jour : ananas, poire, litchi, orange, clémentine, citron et jus de pomme), de projets et de petits gâteaux alsaciens, au son de la voix de Daniel Arasse, avant le retour à l’atelier et à la vraie vie la semaine prochaine.

Alison Gopnik – Le bébé philosophe